La contestation populaire prend de l’ampleur dans la Confédération, second pays – après la Corée du Sud – à adopter cette technologie. Berne a fait un premier pas en direction des opposants en reportant indéfiniment ses directives en attendant de mieux mesurer les effets réels de la 5G . Par Marie Bourreau Publié le 17 février 2020 à 09h33
C’est le paradoxe du déploiement de la 5G en Suisse. La Confédération, habituellement raillée pour sa lenteur et son caractère rétif au changement, fait aujourd’hui les frais de sa hâte à
installer cette nouvelle technologie sur l’ensemble de son territoire, sans avoir saisi l’enjeu citoyen derrière cette révolution numérique.
Résultat, un an après avoir accordé les premières licences d’exploitation, le déploiement de la 5G se heurte à une opposition politique, à coups de moratoires pour bloquer les nouvelles installations d’antennes et une forte mobilisation citoyenne. Après des mois à faire la sourde oreille, Berne a fait un premier pas en direction des opposants, samedi 15 février. La Confédération a décidé de reporter indéfiniment ses directives en attendant de mieux mesurer les effets réels de la 5G et de conserver les valeurs limites actuelles qui ne permettent pas de déployer ce nouveau standard mobile à sa pleine capacité.
Tout avait pourtant bien commencé. La Suisse devait être le premier pays occidental à développer cette technologie révolutionnaire, censée améliorer la rapidité et réduire les temps de latence pour mieux développer les objets connectés, de la voiture autonome au réfrigérateur intelligent.
En moins de deux mois, les fréquences, mises aux enchères pour 380 millions de francs suisses (357 millions d’euros), avaient été attribuées aux trois opérateurs de téléphonie mobile Swisscom, Sunrise et Salt. Le 17 avril 2019, les premières antennes étaient déployées, et les opérateurs promettaient que 90 % du territoire suisse serait couvert, dès décembre 2019.
« Aucune idée de l’effet de ces ondes sur la santé »
Mais, à Genève, des habitants commencent à ressentir les premiers effets secondaires, dès le 18 avril 2019. Le mouvement est lancé. Bertrand Buchs, médecin et député du Parti démocrate chrétien (PDC) pour le canton de Genève s’étonne encore de la « vitesse supersonique des concessions offertes sans aucune concertation sur les risques sanitaires, environnementaux et sécuritaires avec l’utilisation par l’opérateur Sunrise de la technologie de l’entreprise chinoise Huawei. »
L’Etat Suisse – actionnaire à 51,2 % de l’opérateur Swisscom – n’a pas pris la peine d’attendre la publication d’un rapport d’experts sur les risques engendrés par la 5G. Rendu public en novembre 2019, celui-ci n’offre aucune recommandation concrète. Le médecin, lui, ne décolère pas du flou savamment entretenu. « Les opérateurs assurent qu’ils déploient de la 5G, mais c’est une 4G améliorée. Le jour où la 5G va vraiment arriver, ce sera autre chose. On n’a aucune idée de l’effet de ces ondes sur la santé. Il n’y a aucune urgence à déployer la 5G en Suisse. Les citoyens ne veulent pas de ce saut dans l’hyperconnectivité»